Un brin d’amants

Comme j’aimerais poser des dentelles de soie
précieuse et sauvage autour de nos regards
et tisser des panneaux de velours chatoyants
flottant sous le murmure le long de ton départ

Etre fragile et cassante sous le spectre du chagrin
mes doigts de fée couleur de lait tremblants et fins
jouant des airs du ciel pour faire tomber les nuages
comme un voile sur ma tête posée prés de ton rêve

Comme j’aimerais que le silence frileux qui s’anime
s’approche de ta bouche et s’éloigne de la mienne
en ronrons inaudibles sous des mots qui s’inventent
pour faire le bruit des pas d’une histoire qui avance

vers un jour étoilé qui ressemble à mille songes
en un lieu à mi ciel entre un aigle et une ombre
habillée de velours et fardée de dentelles
avec des doigts de fée couleur de lait tremblants et fins
dans les serres d’acier d’un aigle brun aux plumes d’argent.

© Amina MEKAHLI

Juste un baiser pendu

S’il me suffisait de lui dire tant
que son ombre flotte sur l’air
de ma chanson vieille de temps
que sa main lisse mes rides puis
comme une partition perdue oh!

S’il me suffisait de lui rire an
par an mes souvenirs de lui
que je n’ai vu jamais de vie
ni en rêve fleuri jamais vu
mais il rentre et sort en moi

Comme il suffirait de pousser
la porte du poulailler en coq
coloré de mille flammes oui
de cent baisers au cou pendus
et de quelques secondes Nous.

© Amina MEKAHLI

Les femmes qui sortent la nuit

Il y a une catégorie de femmes qui n’existe nulle part ailleurs que par ici “Les femmes qui sortent la nuit” des femmes qui ont transgressé un monde fait par et pour les hommes, un monde où la femme est bijoux, où la femme est genoux, où la femme est caillou, une “chouette” chez les hiboux.

Des femmes qui se glissent entre les failles pour entrer dans les gueules de loups, dans le gouffre de la nuit maudite, la nuit proscrite, une nuit comme un soir pour des hommes qui s’ennuient, qui s’engueulent, qui se vomissent les uns sur les autres, des hommes au masculin pluriel qui n’ont de femme que leur mère, plus vierge que vierge, leurs sœurs sous les verrous et leurs épouses sous la menace.

Des hommes qui guettent, qui s’apprêtent, qui se frottent les uns contre les autres autour de leur bedaine commune. Des hommes de pari en pariade, gloussant des surnoms crasseux sous des moustaches vénales, exhibant leur savoir dans des répliques de fortune.

Des femmes comme vous et moi n’auraient pas besoin de courage pour pousser la porte plus loin que les faux semblants, la porte d’un monde sans partage qui ressemble aux regards des hommes.

Des femmes qui décident que leur vie est un chemin et non pas une idée reçue, des femmes qui choisissent et ne sont pas à choisir, des femmes qui s’amusent sans vouloir amuser la galerie marchande.

Des femmes comme une femme à chaque fois, individu singulier sans sobriquet et sans index au bout du regard.

Des femmes qui s’invitent sans vous inviter messieurs les hommes et sans penser à vos débats houleux sur un Dieu qui ne veille que sur vous, des femmes qui vous ignorent et qui vous plaignent, agglutinés comme des meutes de rescapés d’une guerre contre vous même, criant comme des forçats que vous êtes heureux pour nous, que vous admirez notre audace, que nous devrions être plus nombreuses, mais mon oeil et celui de toutes les femmes qui travaillent plus que vous, qui gagnent plus que vous, qui vous piétinent dans votre tranche horaire, qui dénigrent votre dictât et votre testostérone dans le sens contraire du poil.

Mesdames, de deux sobriquets il faut choisir le moindre, sortir le soir ou s’enfuir; nous restons ici et nous vous regardons”Hommes” assis autour de vos certitudes, poilus et en colère, manger le poisson qui manque à vos enfants et buvant la bénédiction de vos mères qui vous vénèrent imparfaits et odieux.

“Les femmes qui sortent la nuit” habillées d’illusions, flirtant avec vos “égaux “qui trinquent à votre décadence et mâchent votre image jusqu’à la cracher au petit matin sur le lit de leurs promises fertiles qui ne vous ressembleront jamais, vous l’objet du déni.

Je vous regarde souvent petites fleurs venues taper à des heures indues aux portes des impies qui demain au soleil vous maudiront dans les rues.

Je vous regarde souvent belles femmes d’Algérie croyant au feu de paille qu’allume votre venue dans un monde où les hommes se cachent et s’enfuient.

Un feu qui brûle vos rêves et vos derniers défis pour vous conduire souvent dans les demeures de l’ennui.

© Amina MEKAHLI