Je me suis réveillée fille de tout le monde et de personne, femme de tous les hommes, mère par contumace, je me suis réveillée absente dans le miroir de la vérité, invisible sous le ciel. Je me suis réveillée nue de mon charme, blessée par ma propre force, chienne dans la meute, louve apprivoisée, sirène drapée de ténèbres.
Je me suis réveillée avec une envie de tissus, de kilomètres de tissus, aussi longs que le chemin du paradis, avec la flamme de l’enfer au fond des yeux, avec Dieu comme visage, Dieu comme langage, Dieu comme carte d’identité, Dieu comme corps, Dieu comme charme ravageur, Dieu dans mon sillage.
Je me suis réveillée avec l’envie de m’envelopper de brume, de m’enterrer dans la soie, de porter mon linceul vivante, de mourir dans un voile, de respirer l’étoffe des héroïnes mort-nées, de sentir les regards qui attendent sur le corridor d’un palais en tulle.
Je me suis réveillée les armes déposées, le sexe tissé sur le visage, le corps momifié sous des bandelettes de sperme impur, les seins pétrifiés, le ventre nié, les cuisses scellées, le vagin cicatrisé, le clitoris en offrande au diable.
Je me suis réveillée Houri du paradis, ange de la résurrection, terroriste de la féminité, ennemie de l’égalité, Eve du péché retrouvée, je me suis réveillée spectre errant, fantôme de mon innocence, condamnée extra-muros en sursis, je me suis réveillée aguerrie de ma chair, libérée de mon combat, renvoyée de toutes les écoles de l’être, dispensée de courage, je me suis réveillée guérie de la vie…
Je me suis réveillée femme sous une Burqua.
Amina MEKAHLI