Les siècles qui nous écoutent parler arriveront
sur la pointe du temps pour nous surprendre enfin
tes bras autour de mes mots et mes mains posées
sur l’amour que je te confectionne du bout de mes dents
Le silence dans les prairies où même les oiseaux bleus
sont partis avec le vent pour ramener les enfants
pèse comme la voûte courbée d’un ciel décoloré
sur les baisers volés et toutes ces choses qui brillent
Tu t’allonges enfin sur les sables sans mémoire
pour conter à ton corps des histoires sans visages
des caresses pressées avalées sur la faim
et ces milliers de chants que tu mâches en marchant
Je suis venue ce soir regarder la dune
au-delà du désert que ton amour m’a confié
un soir de tous les secrets où la nuit te ressemblait
comme deux petites gouttes d’eau de fleurs d’oranger
Mais mes yeux fragiles de poussière et d’os
s’inventent des mirages au goût familier de l’adieu
et des promesses, des cheveux mouillés de larmes,
des doigts qui se comptent par vingtaine, et des serments.
Et je reste assise au bord de l’attente grise qui blanchit
comme la colombe meurtrie qui survole la langueur
sur cette route encore tracée où mes pas sans adresse
emporteront mon vieux poème à tes oreilles de fennec blessé
Liras-tu ces lettres fatiguées s’alignant sans détours
sur une page tournée par la beauté d’un geste
en posant quelques notes fébriles et audacieuses
sur le toit du Gourbi blanc où tu caches l’instant
Brûleras-tu le messager qui saura te retrouver
ses ailes déployées dans mon âme errante
à l’affût de ces signes qui font trembler les boussoles
quand le nord est perdu et que le sud est en moi
Les siècles qui nous écoutent parler arriveront
sur la pointe du temps pour nous surprendre enfin
tes bras autour de mes mots et mes mains posées
sur l’amour que je te confectionne du bout de mes dents
© Amina MEKAHLI