On paradera pour vous, sous vos regards de conquérants, une fleur à la main.
Vous avez décidé de nous donner une journée de répit, d’oubli, de gloire…
On dansera sur le rythme endiablé de vos lois injustes, de vos traditions archaïques, sur le rythme de vos tambours et de vos hymnes tribaux. On sera des femmes, demain, vous l’avez décidé messieurs.
On sera des femmes enguirlandées comme des sapins généalogiques, comme des louves apprivoisées à coup de code de la famille. Ah oui parlons-en des familles, nous qui lavons, astiquons, repassons, cuisinons, éduquons, nous qui connaissons les tables de multiplication, les programmes scolaires, les prénoms des amis, les noms des professeurs de nos enfants, enfin nous qui connaissons tout, qui continuons à apprendre tous les jours, pour mieux rester le socle, que vous croyez vôtre.
On paradera pour vous, si vous pensez qu’un tour en voiture, un gâteau, un parfum, ou une fleur, peut vous dédommager de nous ignorer dans notre condition de sous-êtres, ligotées par un hymen à votre bonne convenance, bâillonnées par la force et les coups, vidées de notre humanité à moitié.
Nous sommes vos mères, vos filles, vos soeurs ou nous ne sommes rien. Vos maîtresses, vos amantes, vos amours, vos fantasmes, tout cela est de l’ordre établi. Nous n’accédons à cet ordre que emmitouflées dans l’opprobre, emmaillotées dans le déni, mystifiées dans le règne des bas fonds. Nous n’accédons à cet ordre, que sous vos impulsions, nos répulsions, vos désirs, nos espoirs, vos attributs, nos transgressions. Nous ne sommes pas vos égales, nous ne serons pas vos restes.
Bonne fête des femmes, Messieurs. Savourez demain votre suprématie, votre règne inébranlable sous le manteau des religions. Votre dédain et votre indifférence.
Bonne fête des femmes, Messieurs. Demain vous applaudirez le sexe faible, d’être resté faible, pour vous servir, vous contenter, vous soutenir, vous admirer, vous pardonner, vous sublimer.
Bonne fête des femmes, Messieurs. Offrez-nous des fleurs, pour nous cantonner dans nos enclos, dans nos tunnels sans issue, dans vos harem. Vous serez encore une fois, les plus beaux, les plus dignes, les plus forts, les plus raisonnables, les plus mâles.
Demain je ne vous applaudirai pas Messieurs, je ne vous donnerai pas l’occasion de me dire bonne fête Madame. Car ce n’est pas la mienne.
C’est la vôtre Messieurs, celle de votre culpabilité, de votre inconscience, de votre silence, de votre cécité, de votre surdité, de votre barbe qui menace ma tête.
Bonne fête des femmes, Messieurs. Demain je vous le cède. Comme je vous cède tous les autres, en ne marchant plus dans la rue la tête haute et le coeur léger, comme un humain en liberté.
© Amina MEKAHLI.
Sensationnel! J’ai beaucoup aimé.. , merci !
Je partage volontier et avec Votre permission..
Encore Merci..
Avec plaisir.
Mci a vs vs avez bien resumer le quotidien de ttes les femmes mais cette demie jrnee qui ressemble a ttes les autres ne m offre rien de plus, ni la fleur, ni la sortie, ou le resto n change rien pr moi , elle ne sert qu a enrichir les autres, donc a mon avis on devrait la boycotter.
Un plaidoyer pour le moins original en miroir de notre triste condition de femmes quelque soit le lieu dans le monde ou les droits des femmes régressent
Bravo À vous de m avoir touchée profondément .
J’ai trouvé ce texte, tout simplement magnifique. Merci pour ce bel hommage. Des vérités en poésie, avec une telle aisance. Merci pour la femme que vous êtes. Bonne continuation. En tant que femme, je me permets de vous souhaiter une bonne fête.