“La vraie maison de l’amour est toujours une cachette” écrivait Gary

Et puis un jour ou bien une nuit l’Algérie surgit toute entière, égale à elle-même, avec son histoire bigarrée, ses incertitudes, ses convictions, ses hésitations, ses couleurs et ses signes.

Et puis un jour  ou bien une nuit, derrière une porte semblable à mille autres, une hésitation, un arrêt, un halètement, un questionnement, des milliards de réponses et puis rien, une contemplation en silence.

Et puis un jour ou bien une nuit en Algérie, une invitation, une proposition, un acquiescement, une découverte, une slave, des applaudissements, des interrogations, des étonnements, une déambulation, un respect, un regard, des larmes.

Et puis un jour ou bien une nuit, une maison, un univers, une histoire, une géographie, un être, peut-être deux, peut-être plus, un objet et puis deux et puis trois et puis une quintessence, et puis une myriade, un jaillissement, une finitude, une collection personnelle.

Et puis un soir, une invitation, une approbation, un franchissement, un perron, un salon, et puis rien.

Un brouillard de beau, le beau pas celui du temps mais celui de la durée, celle que la science n’a jamais su évaluer, le beau qui ne périt pas, le beau qui n’est pas de mode, qui n’est pas d’époque, le beau qui est passion, trouvaille, pérennité, le beau qui est un être à la place de l’humanité, qui est un être qui peut disparaître sans jamais se dissoudre, le beau des choses qu’on aime par-dessus tout, sans ostentation, ni discours.

Et puis, moi, car c’est moi, déambulant dans l’univers des absents, moi dans l’étonnement qui invoque la présence des poseurs du beau, moi dans la transcendance, moi aux larmes , suppliant la pudeur des modestes, des discrets, des authentiques esthètes de cette harmonie qui m’enveloppait soudain.

L’Algérie, sous le sceau des historiens, n’est que répétition, n’est que soumission rituelle, absente des millénaires créatifs, elle n’est que reproduction. L’Algérie n’est au meilleur des cas qu’un gris réussi. Elle n’est ni noire de passé, ni blanc d’avenir.

Et pourtant, ce soir, ce n’est ni la France, ni l’Afrique, ni le Maghreb, qui m’ont accueilli, non. Ce soir ceux qui m’ont accueilli, ce sont deux regards tournés vers le beau, deus regards tournés vers l’harmonie, deux êtres tournés vers la vie.

Une maison, un univers, des mots jamais écrits, des gestes perdurés qui font briller les cuivres, des gestes modérés qui ont préservé le cristal de la rainure, des gestes maternels qui ont encadré des toiles fragiles, des gestes sans appartenance, qui ont allié orientalistes, bédouins, colons et colonisés.

Une maison où règne sans partage, l’humain dans tout son don artistique.

Une maison qui me parle encore et à jamais, témoin d’une époque, de deux, de plusieurs, une maison comme un don sans retenue, au regard de ceux qui sont passés, qui passeront un jour. Une maison où je suis passée, et de laquelle je ne reviendrais pas la même. Désormais.

Et puis, j’ai eu les larmes, la reconnaissance, la joie, le recueillement, l’humilité. Entre les cristaux de bohème, les salons louis XIV, les canevas, les broderies au point de croix, les richelieus, les tapis aussi beaux les uns que les autres, les cuivres rutilants, les contemporains, les Boumehdi, les orientalistes, les photos révolutionnaires, les empreintes éparses de l’un des premiers médecins algériens, les souffrances, le combat, la trajectoire, la relève, la rigueur dans la continuité, la France sans virgule, l’Algérie sans point d’interrogation.

Et puis une nuit, entre deux mots, entre trois livres, entre certaines connivences, une sentence du beau. Le beau sans passé, sans avenir, sans discorde et sans arguments. Le beau comme une maison, un musée à mémoire ouverte, un médecin défunt et son épouse gardienne du temple  de la contemplation sans équivoque, sans questionnements, sans malaise.

Merci je dirais ce soir à cette Algérie, qui loin des certitudes a su créer le certain.

Merci à cette dame sans âge, sans rides, sans drames. Cette dame qui m’a offert l’émotion d’une visite dans les méandres de la vie, comme elle devrait, la vie comme un cadeau à offrir éternellement aux passants désemparés.

Ce soir j’ai visité une vie, une vie qui ressemble à un musée, une vie qui entretient un passé aussi reluisant que l’avenir le plus prometteur.

Merci à un ami qui est cher à mon cœur qui se reconnaitra, de m’avoir offert cette déambulation dans l’univers de son papa, de sa maman qui au-delà d’avoir vécu, ont donné vie à une mémoire qui ressemble au plus bel avenir.

© Amina MEKAHLI

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